10/02/2013

Cloud Builders : 6 défis, 6 opportunités en surfant le tsunami cloud

Dans ce second article de la série Surfez le tsunami cloud*, je reviens sur les défis et les opportunités auxquels font face les intégrateurs d'infrastructures et les CSIs (consultants and systems integrators) qui embrassent un modèle de business de cloud builder.

Les cloud builders conçoivent, construisent et mettent en oeuvre des clouds privés.
Souvent, ils complètent leurs services en fournissant aussi l'hébergement et/ou l'infogérance associés à ces clouds privés.
Leurs clients sont des moyennes et grandes entreprises qui ont besoin d'un cloud privé, mais aussi des "cloud providers" qui veulent fournir des services cloud à leurs propres clients ou à des communautés (transformant alors le cloud construit pour eux en un cloud communautaire ou public).

On trouve des cloud builders parmi les revendeurs de matériels/logiciels et les intégrateurs d'infrastructures traditionnels tels que APX, D.FI, Overlap, SCC, mais aussi chez les CSIs comme Sogeti, Cap Gemini, IBM GTS (Global Technology Services).
Pour mettre en oeuvre les clouds privés qu'ils construisent, les cloud builders exploitent les technologies matérielles et logicielles de fournisseurs tels qu'IBM (PureSystems, Tivoli..). Ils adhèrent souvent aux programmes de certification cloud comme par exemple l'IBM Cloud Computing Specialty.

Les cloud builders développent des compétences et des services dans plusieurs domaines complémentaires :
  • Consulting cloud : définir une "cloud roadmap", bâtir l'architecture cloud cible, construire un catalogue de services, concevoir des processus "devops", accompagner la transformation vers le cloud.
  • Architectures cloud : exploiter des architectures de référence (voir par exemple la IBM CRRA) pour construire les infrastructures et les services cibles.
  • Technologies cloud : choisir les bonnes technologies et composantes matérielles et logficielles en fonction de chaque usage, charge de travail (workload), projet...
  • Gestion de services cloud : aider le client à standardiser, automatiser, industrialiser la délivrance de services cloud.
  • Cloud hybride, cloud brokerage : exploiter des services de cloud publics quand c'est pertinent, compléter le cloud privé par des services de cloud public fournis par des fournisseurs sélectionnés.
  • Financement cloud : fournir des solutions en mode capex (capital expenses), mais aussi en mode opex (operational expenses) et en paiement à l'usage.
  • Délivrance de services cloud : héberger et gérer le service cloud du client une fois qu'il est construit, proposer des services d'infogérance partagés/mutualisés, agir comme un MSP (Managed service provider), un "cloud provider"...
Comme beaucoup de leurs fournisseurs, les cloud builders commencent souvent par du "cloud washing"
Dans le cadre de ma mission de développement des partenaires cloud, je travaille régulièrement avec des partenaires IBM qui sont ou veulent être des cloud builders.
Plusieurs ont clairement entrepris leur voyage vers le cloud, mais certains continuent à pratiquer le "cloud washing" en associant un vocabulaire cloud à leurs offres traditionnelles autour des infrastructures virtualisées (et de l'hébergement/infogérance), mais sans développer de vraies solutions cloud.

Lorsqu'ils ont vraiment décidé de surfer le tsunami cloud, les cloud builders font face à des défis qui sont autant d'opportunités :

6 défis pour les cloud builders:
  1. Faire face à la pénurie de talents : Dans un marché cloud où les tensions montent sur le front des compétences, les cloud builders ont du mal à attirer et à retenir les talents cloud dont ils ont besoin pour se différencier et être positionnés comme des experts dans le domaine des clouds privés et hybrides.
  2. Offrir des solutions en opexBien que le mode capex soit toujours favorisé par certaines catégories de clients, il y a de plus en plus de demandes pour des solutions de cloud privé délivrées en mode opex. La pression des offres IaaS/PaaS/SaaS des acteurs du cloud public force les cloud builders et leurs fournisseurs de technologies à trouver des montages innovants pour proposer leurs solutions de cloud privé "as a service".
  3. Devenir (ou non) un "cloud provider": Beaucoup de cloud builders sont aussi devenus des MSP (managed service provider) qui pratiquent l'hébergement et/ou l'infogérance d'infrastructures. Mais ce côté de leur business manque généralement d'ampleur et de profondeur et beaucoup restent en mode "cloud washing" ou "cloud canada dry" : Tout en appelant leur offre "cloud", ils fournissent en fait des infrastructures virtualisées qu'ils provisionnent, gèrent et supportent de manière plus ou moins artisanale, sans self service, sans catalogue de services et sans véritable standardisation, automatisation, industrialisation, elasticité... Vont-ils réussir dans un marché IaaS en cours de commoditisation ou doivent-ils devenir des cloud brokers et exploiter les services cloud de fournisseurs plus spécialisés ?
  4. Résister aux fournisseurs : La plupart des cloud builders viennent du monde des revendeurs et des intégrateurs d'infrastructures. Ils répondent aux sollicitations et aux priorités de leurs fournisseurs majeurs. Or, ceux-ci ont souvent encore des difficultés à ajuster leurs processus, leur reporting, leurs indicateurs clés et leurs équipes pour un business cloud. D'autres fournisseurs pensent trouver le Graal en s'adressant désormais aux directions fonctionnelles en plus de l'IT. Plutôt que d'organiser des complémentarités entre partenaires (P2P - partner to partner), ils poussent, souvent à mauvais escient, leurs revendeurs d'infrastructures à sortir de leur domaine d'expertise et à développer des compétences fonctionnelles autour de leurs solutions applicatives. Certains cloud builders ont du mal à résister à la fois aux priorités du business de revente traditionnel et à des diversifications contre nature !         
  5. Développer une culture cloud : Les directions des ventes et les ingénieurs d'affaires des intégrateurs n'ont pas toud acquis un niveau de confort suffisant avec le cloud. Ils trouvent tous types de mauvaises explications pour résister au cloud, depuis les objections tarte à la crème des prospects jusqu'au tagging "cloud" de n'importe quel projet de virtualisation... sans cloud. Le développement d'une culture cloud chez un revendeur/intégrateur historique est une tâche ardue qui nécessite souvent de dédier des équipes pour réussir.
  6. Se focaliser et s'allier : Lorsqu'ils décident tout à la fois de contruire et d'opérer des cloud par eux-mêmes, beaucoup de cloud builders manquent de compétences et de moyens pour être bien positionnés dans les deux domaines à la fois : consultants/architectes/builders ET fournisseur de services cloud. De plus, lorsqu'ils élargissent et diversifient leur portefeuille cloud et qu'ils veulent délivrer les produits et les services correspondants avec leurs propres ressources, ils délivrent un signal négatif aux partenaires complémentaires avec lesquels ils pourraient d'associer. Pour eux, c'est un vrai challenge que de passer d'un mode "nous faisons tout pour vous par nous-même" à une approche "nous sommes excellents dans certains domaines précis, et nous nouons des partenariats pour vous apporter une solution complète".
6 opportunités pour les cloud builders :
  1. Fournir des compétences cloud : La pénurie de talents cloud profite aux cloud builders qui ont solidifié leur position sur le marché du cloud privé et qui tirent profit des certifications et des compétences cloud de leurs consultants, architectes, intégrateurs et avant-vente.  
  2. Proposer des solutions capex et opex : Les cloud builders solides financièrement qui savent exploiter les possibilités de financement et les programmes de "pay as you grow" de leurs fournisseurs trouvent des méthodes innovantes pour proposer des solutions de cloud privé flexibles en mode opex.
  3. Infogérer des clouds: Certains cloud builders résistent à la tentation de devenir un fournisseur de services de cloud public par eux même. Ils préfèrent jouer un rôle de cloud broker pour apporter des services complémentaires à leur clients. Ils développent aussi leur business cloud récurrent en infogérant les clouds des clients, et ce quelque soit leur nature (cloud privé, hybride, communautaire, public...) et leur localisation (chez le client, hébergé dans un data center tiers, hébergé par le cloud builder lui-même, fourni par un cloud public...). 
  4. S'adosser à certains fournisseurs : Les cloud builders qui choisissent de s'adosser à des vendeurs de technologies cloud leaders répondent aux objectifs de ces fournisseurs de montrer un forte progression de leur business cloud. En maîtrisant les technologies matérielles et/ou logicielles de ces fournisseurs, ils acquièrent la confiance de prospects et clients à la recherche d'expertise, mais ausi celle des équipes vente et avant-vente des dits fournisseurs. Ces derniers sont contents de s'appuyer sur des partenaires souvent aussi ou plus compétents qu'eux en matière de cloud. Ce type d'opportunité n'est pas nouveau, mais l'alignement avec un fournisseur reste une stratégie efficace, surtout dans des marchés nouveaux ou peu matures... si tant est que le fournisseur est en capacité de devenir un leader de ces marchés ! 
  5. Développer une culture cloud : Migrer vers un business cloud est un peu plus simple pour un cloud builder que pour ceux qui choisissent d'autres modèles de business cloud. Que ce soit sous un angle technique ou financier, les cloud builders continuent à travailler en mode projet (consulting, intégration et mise en oeuvre de clouds privés). Ils revendent souvent des matériels et de logiciels comme ils ont l'habitude de le faire. En refocalisant certains de leurs consultants, architectes, intégrateurs, avant-vente et vendeurs sur la vente et la construction de clouds, ils démarrent tout naturellement une culture technique cloud en interne et chez leurs clients. Le succès du déploiement d'une culture commerciale cloud dépend du bon alignement des forces commerciales et de leurs dirigeants. Comme c'est typiquement parmi les dirigeants commerciaux "historiques" qu'on retrouve les plus réticents au cloud, il peut être pertinent de nommer un directeur/leader des ventes cloud dédié.
  6. Se focaliser et s'allier : Les cloud builders qui comprennent la puissance de la spécialisation et des partenariats P2P (partner to partner) répondent mieux aux besoins cloud des clients à qui ils peuvent fournir de vrais résultats business (et pas seulement des infrastructures). Ils bénéficient également d'une position plus claire et plus forte dans leur propre domaine d'expertise. Pour nouer des partenariats cloud avec leurs pairs (intégrateurs fonctionnels et experts métier notamment, mais aussi MSPs et fournisseurs de services cloud), ils sont assistés par certains fournisseurs majeurs comme IBM et par leurs VADs (value added distributors), mais aussi par des experts spécialisés qui maîtrisent le sujet des canaux de distribution, des partenariats et des alliances cloud.      
Ma liste est évidemment subjective. N'hésitez-pas à nous parler d'autres challenges ou d'autres opportunités pour les cloud builders en 2013 !

*Surfez le tsunami cloud
Dans cette série d'articles, j'observe la migration de l'écosystème IT vers le cloud, avec un focus sur :
  1. les éditeurs qui reinventent leur business au delà du SaaS ... (premier article),
  2. les intégrateurs d'infrastructures et les CSIs qui deviennent cloud builders... (cet article),
  3. les MSPs et hébergeurs/infogéreurs qui industrialisent la délivrance de services cloud,
  4. les VARs et les distributeurs qui deviennent des revendeurs cloud, des cloud brokers, des agrégateurs de services cloud,
  5. les prestataires de services business qui exploitent le cloud et bouleversent le marché IT. 
Dans la même veine, vous pouvez également lire mon papier sur le Coming out cloud de l'écosystème IT ou mes Prédictions pour l'écosystème cloud en 2013.

Loic Simon
Cloud Channel Development Executive - IBM
loic_simon@fr.ibm.com +33 6 76 75 40 71

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